“La Turquie est revenue du bord d’un précipice, grâce à mon peuple qui s’est mis devant les chars de combat “, commentait le Président Tayyip Erdogan à l’arrivée à Istanbul depuis sa résidence dans Marmaris, où il passait ses vacances et aussi où les putschistes voulaient l’éliminer. Si les masses civiles auraient sauvé le gouvernement constitutionnel dans le pays, la Turquie célébrerait aujourd’hui la fête des droits démocratiques. Mais pour le moment ce qui règne dans tout le territoire national c’est la répression brutale du gouvernement sur presque tous secteurs de la population et surtout sur les institutions de l’État.
Il y a pour le moment plus de 18.000 personnes gardées, 10.192 d’elles arrêtées (853 officiers militaires, 157 généraux – plus de la moitié du total-, 898 soldats, 751 policiers) dans l’administration, les entreprises publiques et les universités ; et des dizaines de milliers de fonctionnaires et des employés suspendus de leurs fonctions (60.000), en attendant des susceptibles de possibles arrestations et des jugements pour appartenir, selon le gouvernement, à ce que le Président et les juges appellent FETO (Organisation terroriste de Fetullah Gulen).
En réalité, d’abord ce qui a affaiblie et qui a mené à l’échec le coup d’État a été la “trahison” des généraux nationalistes laïques de l’armée. Bien que l’islamiste Mouvement de Servicio[1] soit la plus grande confrérie de la Turquie, ses adeptes fidèles militaires forment une minorité presque insignifiante à l’intérieur des Forces Armées, en tenant en compte la grande taille de la deuxième armée la plus puissante de l’OTAN (650.000 effectifs). Et en fait, ils projetaient le coup pour le mois de septembre de cette année avec l’espoir d’accumuler plus de forces contre le gouvernement. Cependant, ils ont reçu l’information sur les listes de purges que le gouvernement avait confectionnées et qu’il était prêt à procéder des arrestations à partir du 16 juillet. Cette information a été la raison par laquelle les putschistes ont décidé d’avancer son projet et de faire descendre dans la rue les chars de combat dans les principales villes. Ils ont arrêté le chef d’état-major et quelques généraux qui ne voulaient pas participer à l’aventure, mais ils n’ont pas réussi le soutien des nationalistes ni capturer le Président qui a été informé de la tentative putschiste et il a pu fuir une heure avant que les militaires soient arrivés a sa résidence. Après que le Président s’adressait au pays depuis son téléphone portable et il a appelé les gens à descendre dans la rue, et surtout après les appels des militaires de haut rang non-putschistes aux troupes pour qu’ils se retirassent à ses quartiers, la tentative a échoué.
Pourquoi les nationalistes anti-Erdogan n’ont-ils pas participé au coup d’État ?
Par plusieurs raisons. D’abord, parce que c’était le même Fettullah Gulen, qui en 2007 a collaboré avec le gouvernement d’Erdogan et presque a dirigé, à travers des procureurs et des juges islamistes proches à lui, une autre purge avec le jugement et le châtiment de centaines de militaires nationalistes kemalistes[2]qui ont été emprisonnés pendant des années. Quand Erdogan a rompu avec Gulen en déclarant qu’il l’avait “trompé” sur les intentions putschistes de ces militaires, la justice a laissé en liberté les emprisonnés et les a acquittés des accusations. Aucun d’eux n’a pu revenir à sa carrière militaire, mais ses collègues se sont vengés des partisans de Gulen par sa collaboration dans la répression du secteur kemaliste. Une autre raison c’est que les nationalistes ont possiblement pensé qu’un gouvernement militaire dirigé par les islamistes du Mouvement de Service serait beaucoup plus anti-laïque et extrémiste que celui-là de l’AKP[3].
Pourquoi la rupture entre les islamistes ?
Le plus curieux c’est que un secteur du mouvement islamiste (la confrérie de Gulen) a réalisé la tentative putschiste sur un autre secteur du même signe, celui-là de Tayyip Erdogan du gouvernement de l’AKP. En fait, les deux secteurs islamistes ont été jusqu’à il y a 8 ans alliés inséparables contre les pouvoirs économiques et financiers traditionnels. La bourgeoisie laïque, créée et gâtée par la bureaucratie kemaliste s’est toujours alimentée des politiques du capitalisme d’état. Mais quand l’économie centraliste, à la fin des 70, est entré dans un processus de crise structurelle et déjà n’avait pas d’autre choix que s’intégrer sur le marché globalisé, la faible bourgeoisie islamiste a trouvé des nouvelles possibilités d’obtenir de crédit ( saoudites, qataris, etc..) et aux nouveaux marchés au Proche-Orient et en Asie : elle s’est économiquement fortifié (en devenant les dénommés Tigres de l’Anatolie), mais aussi politiquement pour disputer le pouvoir. Malgré que la bourgeoisie laïque s’accrochât aux militaires kemalistes qui ont puni plusieurs fois les courants islamistes, finalement le parti de Tayyip Erdogan, le Parti de la Justice et le Développement est arrivé au pouvoir en 2003, avec le soutien du courant de Gulen, et avec un discours de démocratie et de liberté contre un “état-bourreau”.
Gulen, toujours sans aucune fonction officielle, a aussi encouragé Erdogan à limiter les pouvoirs de l’armée dans le régime en changeant la composition du tout-puissant Conseil de Sécurité Nationale en faveur des membres du gouvernement contre les commandements militaires, en élevant le rang de les officiers les plus religieux et en mettant à la retraite les autres, etc.. Et en 2007 il a collaboré avec le gouvernement d’Erdogan (grâce à ses procureurs et des juges islamistes proches) dans la purge, le jugement et le châtiment de centaines de militaires nationalistes prétendument putschistes.
Le Mouvement de Service contrôle des centaines d’entreprises, certains d’entre elles multinationales, a des investissements financiers et industriels aussi à l’intérieur du pays qu’à l’étranger, est hégémonique sur quelques marchés à l’intérieur et à l’étranger, possède un grand réseau d’écoles et d’universités dans tout Proche-Orient et à l’Afrique (plus de 2000 écoles dans 120 pays, la moitié en Turquie), dirige quelques médias (45 journaux, 16 canaux de TV, 29 maisons d’édition), etc..
Par ailleurs, les nouveaux riches de l’AKP se sont bénéficié des investissements publiques, des privatisations, des adjudications de grands travaux publics, ont eu l’accès au crédit bon marché de la banque turque et ils veulent occuper une meilleure place dans la bourse. Cependant, ce n’est pas une distribution ni pacifique ni toujours “juste” pour ceux-ci. Les contradictions entre la plus grande confrérie de Gulen et la confédération de sociétés islamistes autour de Tayyip Erdogan ont été tendues il y a longtemps et encore plus avec les bons résultats de la croissance économique. La rupture est venue quand les deux secteurs ont essayé de s’imposer des institutions de l’État et surtout avec les enregistrements qui ont diffusé les adeptes de Gulen en décembre 2013 qui démontraient la corruption de quelques membres du gouvernement et du premier ministre Erdogan.
Alors que faut-il faire maintenant ?
D’abord, les vainqueurs veulent, selon ses termes, “extirper le cancer depuis sa racine” avec des purges et des arrestations de milliers de supposés partisans de Gulen. Cependant, les partis de l’opposition, les ONG’s, les syndicats et jusqu’aux organisations patronales craignent l’étendue possible de la répression vers des secteurs démocratiques. Le régime d’exception, déclaré dans tout le pays, autorise le gouvernement à agir par décret-loi, fortifie cette méfiance. Et tout cela a créé évidemment une atmosphère d’instabilité dans la vie politique et économique. Le prix du dollar a monté de moins de 2,90 lyres turques à plus de 3 dans trois jours. La bourse a perdu plus de 6 %, qui marquent le départ du capital étranger de court terme par la méfiance dans les investissements malgré les déclarations rassurantes du directeur de la Banque centrale turque. S&P a baissé la note de la Turquie du BB + au BB. Et naturellement, après les attentats terroristes, les putschistes ont frappé sérieusement le tourisme déjà très affaiblie.
Il faut être très naïf espérer que cette traînée de poudre ne brûle pas à la classe ouvrière. C’est une opportunité tombée du ciel pour la bourgeoisie groupée autour de l’AKP, qui veut nettoyer ce qui reste du mouvement ouvrier indépendant. Il prépare le terrain pour le chemin pour caractériser n’importe quelle tentative de syndicalisation, n’importe quelle grève ou résistance, ou la même l’action de travailleurs démocratiques, comme une manifestation du terrorisme du FETO ou comme une défense du coup d’État. Dans ce sens, le bonapartisme a fortifié ses arguments politiques et idéologiques et ses dispositifs administratifs et il laisse entendre clairement que si ces mesures deviennent insuffisantes, il pourrait mobiliser des pouvoirs favorables à (la loi de la) Sharia. Par exemple, si ses forces de police deviennent insuffisants, le gouvernement a déjà exprimé son intention de réduire les conditions requises de contrôle d’armes qui permettent à des civils à les porter avec permission.
Le processus en cours c’est clairement un conflit de classes. Quelques secteurs de la bourgeoisie donnent soutien à la “terreur constitutionnelle” avec l’espoir de partager une partie du butin. Ceux qui ont été intégrés dans l’économie mondiale, bien qu’ils disent se sentir honteux sur l’état de la démocratie turque devant l’UE et les États-Unis, ils se rétrécissent de peur et ils essaient de gérer ses entreprises dans les actuelles conditions. Les secteurs de la petite bourgeoisie, qui sont entrés dans une frénésie de rage avec les effets de la crise, ont maintenant une opportunité réelle d’obtenir des positions et de devenir riches et ils sont disposés à purger n’importe quel travailleur au-dessous de ceux-ci, n’importe quel progressiste laïque, n’importe quel socialiste ou révolutionnaire, et n’importe quelle organisation révolutionnaire et démocratique en incluant les syndicats. Ces secteurs ont un leader et uniquement ils ont besoin un de ses signaux pour agir. Certains n’attendent même pas ce signal et déjà ils essayaient d’établir son propre ordre dans les quartiers et les villes.
Ce qu’il manque maintenant c’est la direction de la classe ouvrière. Les travailleurs n’ont pas besoin des fronts démocratiques de caractère indéfini. En contrepartie, ils ont besoin d’une direction solide, décidée et courageuse qu’elle puisse mobiliser les masses pour pousser une révolution politique et un gouvernement des travailleurs. Ce sont les conditions uniques pour l’établissement de vraie liberté démocratique en Turquie. À la fois, il faut être conscient que cet objectif seulement peut être construit à dans et depuis les mobilisations de masses. Les socialistes doivent travailler sans cesse vers cet objectif.
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